PAMAR : une victoire historique

Article de Charles Hoareau pour la section de ANC – section URC du Midi

Vendredi matin 9h l’avocat appelle deux fois de suite et quand je le rappelle il m’engueule presque : « Tu n’as pas répondu ! on a gagné ! La cour d’appel a confirmé les prud’hommes ! Ils sont réintégrés » Ils (en majorité elles d’ailleurs) ce sont les PAMAR, ces hommes et ces femmes d’une blanchisserie de cliniques privées qui ont décidé il y a deux ans « de relever la tête et de ne plus jamais la baisser » ce qui était déjà une victoire sur eux-mêmes comme le dit celle que tout le monde ici appelle Kala, la déléguée CGT qui est à la fois la voix de la sagesse et de la revendication, celle qui écoute et qui ensuite répercute auprès de la direction, du préfet, de l’ARS [1], celle qui parle avec force et calme et fait se lever d’enthousiasme ému une salle entière.

Ils avaient gagné sur eux-mêmes, mais là ils et elles ont gagné devant la justice. Ils et elles, Sonia, Youssouf, Momo, Soifia, Islam, Idriss, Lilia, Madi, Fatou. Et puis il y a les autres qui vont suivre, Rachid, Florent, Lydie, Michel…

Ils et elles qui ont connu les années de peur du chômage qui fait accepter tête baissée les humiliations, les insultes, les cris . Ils et elles ont connu les interdictions de parler dans leur langue y compris durant les pauses, elles et eux qui ont été obligés de cracher derrière les machines, l’eau qu’on voulait les forcer à boire durant le ramadan, elles et eux qui n’avaient pas droit à la douche et devaient manipuler du linge contaminé, elles et eux qui ont découvert « après s’être levés » à quel point ils avaient travaillé dans des conditions sanitaires mettant en danger leur santé et celle de la population qu’ils croisaient… Parce qu’ils avaient eu le malheur de vouloir écrire à l’inspection du travail et que la direction l’avait su, elle avait envoyé, le 19 décembre 2023, un commando pour les menacer de mort. Sur les conseils de Paul de l’UL CGT, Kala et Sonia, la porte-parole courageuse qui élève seule ses 3 enfants, étaient allées au commissariat voisin porter plainte et tous les salariés menacés se sont alors mis en droit de retrait. Et depuis cette date, tous les matins le groupe se présentait devant l’entreprise pour demander à reprendre le travail en toute sécurité et donc sans la chef du commando et dans des conditions de travail respectant la législation…Et on profitait pour afficher le nombre de jours…

Pour toute réponse, et malgré les injonctions de l’inspection du travail, la direction de ce grand groupe de santé privé 28 entreprises qui se facturent allègrement sur le dos de la sécu des prestations dont les prix varient sans explications, cette direction-là, au lieu d’engager le dialogue, après avoir licencié 2 salariés pour des pseudo fautes d’avant droit de retrait, décidait de licencier la totalité de celles et ceux qui tous les matins venaient demander de travailler en toute sécurité. Saisis en référé (procédure d’urgence) le conseil de prud’hommes dans cette affaire qui était déjà sans doute le plus long droit de retrait de l’histoire sociale, le tribunal ordonnait la réintégration. Jugement rarissime à ce niveau de juridiction…et question de justice et de dignité pour les salariés.

La direction au lieu de réintégrer et de mettre en place les mesures prescrites par la Direction du travail a cru qu’elle pouvait s’en dispenser (ce qui lui a valu une amende !) et a fait appel. La sentence est tombée hier : réintégration confirmée…

Evidemment chez les membres actifs du piquet c’était la joie, une explosion de joie même chez celles et ceux qui se sont affirmés, jour après jour, dans le froid des matins passés devant le portail, des lutteurs et des lutteuses déterminées. Mais c’était la joie aussi chez nombre de celles et ceux qui n’avaient pas rejoint le mouvement mais avec qui le dialogue n’a jamais été rompu. Evidemment pour la direction c’est autre chose…
Il y aura beaucoup de pages encore à écrire sur cette lutte hors du commun mais pour l’instant on se prépare à fêter comme il se doit le prochain rendez-vous est le 730ème jour, soit 2 ans de lutte. Le 19 décembre à 10h 30 devant le portail de PAMAR où on pourra enfin parler conditions de réintégration !!!

Toutes et tous le 19 à PAMAR

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